Les limites de l’action syndicale en matière de validité du règlement intérieur

 

Il résulte des articles L. 1321-4 et L. 2132-3 du code du travail qu'un syndicat est recevable à demander en référé que soit suspendu le règlement intérieur d'une entreprise en raison du défaut d'accomplissement par l'employeur des formalités substantielles prévues par le premier de ces textes.

 

En effet, en l'absence de ces formalités le règlement intérieur ne peut être introduit, dès lors que le non-respect de ces formalités porte un préjudice à l'intérêt collectif de la profession qu'il représente.

 

En revanche, la Cour de cassation retient, aux termes d’un arrêt du 23 octobre 2024, qu’un syndicat n'est pas recevable à demander au juge statuant au fond la nullité de l'ensemble du règlement intérieur ou son inopposabilité à tous les salariés de l'entreprise, en raison du défaut d'accomplissement par l'employeur de ces formalités substantielles.

 

Les faits sont les suivants :

 

M. [I] a été engagé en qualité de technicien de maintenance, le 12 mars 2001, par la société Schindler (la société).

 

Par lettre du 19 octobre 2011, il s'est vu notifier une mise à pied disciplinaire de deux jours.

 

Le salarié a saisi la juridiction prud'homale, le 12 juillet 2016, de demandes tendant à obtenir l'annulation de la mise à pied, le remboursement des retenues effectuées par la société à ce titre et diverses sommes à titre de dommages-intérêts.

 

Le syndicat CGT Schindler (le syndicat) est intervenu volontairement à l'instance.

 

Le syndicat fait grief à l'arrêt de la cour d’appel de rejeter ses demandes portant sur le règlement intérieur, alors qu’il appartient en particulier à l'employeur de justifier de l'accomplissement des formalités d'affichage du règlement intérieur .

 

Le syndicat CGT Schindler, a formé le pourvoi n° W 22-19.726 contre l'arrêt rendu le 2 juin 2022 par la cour d'appel de Versailles (6e chambre), dans le litige l’opposant à la société Schindler.

 

Position de la Cour de cassation :

 

La Cour de cassation vise l'article L. 1321-4 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017.

 

Aux termes de ces dispositions le règlement intérieur ne peut être introduit qu'après avoir été soumis à l'avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel ainsi que, pour les matières relevant de sa compétence, à l'avis du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

 

Le règlement intérieur indique la date de son entrée en vigueur. Cette date doit être postérieure d'un mois à l'accomplissement des formalités de dépôt et de publicité.

 

En même temps qu'il fait l'objet des mesures de publicité, le règlement intérieur, accompagné de l'avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et, le cas échéant, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, est communiqué à l'inspecteur du travail.

 

Ces dispositions s'appliquent également en cas de modification ou de retrait des clauses du règlement intérieur.

 

La Cour de cassation rappelle que le règlement intérieur ne peut entrer en vigueur dans une entreprise et être opposé à un salarié dans un litige individuel que si l'employeur a accompli les diligences prévues par l'article L. 1321-4 du code du travail qui constituent des formalités substantielles protectrices de l'intérêt des salariés.

 

La Cour de cassation vise également l'article L. 2132-3 du code du travail, aux termes duquel les syndicats professionnels ont le droit d'agir en justice.

 

Ils peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent.

 

Il s'ensuit qu'un syndicat est recevable à demander en référé que soit suspendu le règlement intérieur d'une entreprise en raison du défaut d'accomplissement par l'employeur des formalités substantielles prévues par l'article L. 1321-4 du code du travail, en l'absence desquelles le règlement intérieur ne peut être introduit, dès lors que le non-respect de ces formalités porte un préjudice à l'intérêt collectif de la profession qu'il représente.

 

En revanche, la Cour de cassation rappelle qu’un syndicat n'est pas recevable à demander au juge statuant au fond la nullité de l'ensemble du règlement intérieur ou son inopposabilité à tous les salariés de l'entreprise, en raison du défaut d'accomplissement par l'employeur des formalités substantielles prévues par le texte précité.

 

L'arrêt de la cour d’appel retient que le règlement intérieur de la société est régulier et opposable aux salariés de l'entreprise.

 

En conséquence le moyen, inopérant en ce qui fait grief à l'arrêt de rejeter les demandes du syndicat tendant à déclarer le règlement intérieur inopposable aux salariés de la société, ne peut être accueilli.

 

Par ces motifs, la cour rejette le pourvoi et condamne le syndicat CGT SCHINDLER aux dépens.

 

Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 octobre 2024, 22-19.726, Publié au bulletin

 

 

 

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