Contrôle et surveillance des salariés à la suite de messages envoyés par le salarié au moyen du téléphone mis à disposition par l'employeur

 

Les messages adressés par un salarié à des collègues en poste ou ayant quitté l'entreprise, contenant des propos critiques à l'égard de la société et dénigrants à l'égard de ses dirigeants, qui bénéficient d'une présomption de caractère professionnel pour avoir été envoyés au moyen du téléphone mis à sa disposition pour les besoins de son travail et dont le contenu est en rapport avec son activité professionnelle, ne revêtent pas un caractère privé et peuvent être retenus au soutien d'une procédure disciplinaire, peu important que ces échanges ne soient pas destinés à être rendus publics.

Telle est la position de la Cour de cassation aux termes d’un arrêt du 11 décembre 2024.

 

Les faits sont les suivants :

 

M. [K] a été engagé en qualité de « business unit manager », le 4 novembre 2011, par la société MAPE (la société).

 

A compter du 20 septembre 2016, il s'est vu confier, en sus de ses fonctions, celles de conseiller du président.

 

Il a été licencié le 17 avril 2018, pour faute lourde, en raison de son refus de collaborer avec la nouvelle direction et de ses propos critiques et dénigrants visant la société et ses dirigeants, tenus lors d'échanges électroniques et par SMS envoyés au moyen de son téléphone portable professionnel.

 

Le salarié a engagé une procédure contentieuse à l’encontre de son employeur pour contester cette rupture et aux fins de juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

 

Le salarié fait grief à l'arrêt la cour d’appel de PARIS de juger que son licenciement était justifié par une faute grave et de le débouter de ses demandes d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement et d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

 

Réponse de la Cour de cassation

 

La Cour de cassation vise l'article L. 1121-1 du code du travail.

 

Sauf abus résultant de propos injurieux, diffamatoires ou excessifs, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression.

 

A cet égard, la Cour de cassation retient que la cour d'appel a relevé que le salarié avait désigné un membre de la société sous la dénomination dénigrante « [R] » et avait détourné l'appellation « l'EPD » (entretien progrès développement) en répondant à son collègue en ces termes « on peut vraiment dire : le PD » pour désigner le directeur général M. [N], caractérisant ainsi l'existence, par l'emploi de termes injurieux et excessifs, d'un abus dans l'exercice de sa liberté d'expression, peu important le caractère restreint de la diffusion de ces propos.

 

La Cour de cassation relève de plus que la cour d'appel a constaté que les propos visés dans la lettre de licenciement avaient été tenus par le salarié par messages SMS envoyés au moyen de son téléphone portable professionnel, lors d'échanges avec des salariés en poste, ou des salariés ayant quitté la société concernant les litiges prud'homaux les opposant à celle-ci et, ensuite, qu'il s'agissait de propos critiques de la société et de propos dénigrants à l'égard de ses dirigeants.

 

De ces constatations et énonciations, dont il ressortait que les messages litigieux, qui bénéficiaient d'une présomption de caractère professionnel pour avoir été envoyés par le salarié au moyen du téléphone mis à sa disposition par l'employeur pour les besoins de son travail et dont le contenu était en rapport avec son activité professionnelle, ne revêtaient pas un caractère privé, la cour d'appel a exactement déduit, peu important que ces échanges ne fussent pas destinés à être rendus publics, qu'ils pouvaient être retenus au soutien d'une procédure disciplinaire.

 

Par ces motifs, la Cour de cassation rejette le pourvoi introduit par M. [K] .

 

Soc. 11 déc. 2024, F-B, n° 23-20.716

 

 

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