Mandat social et rupture du contrat de travail

 

La rupture du contrat de travail pour faute de gestion d’un mandataire social ne peut se justifier que pour des faits relevant de son contrat de travail et non de son mandat social.

 

Telle est la position de la Cour de cassation aux termes d’un arrêt du 17 mai 2023.

 

 

Les faits sont les suivants :

 

M. [O] a été engagé en qualité de directeur général de l'activité négoce à compter du 3 juin 2013 par la société Herige, qui appartient au groupe Herige.

 

Le 2 janvier 2015, par convention tripartite conclue entre la société Herige, la société Financière VM distribution et M. [O], le contrat de travail conclu entre ce dernier et la société Herige a été transféré au sein de la société Financière VM distribution (la société) à la suite de la restructuration du groupe.

 

Le contrat de travail de M. [O] a été suspendu en raison de sa nomination en qualité de directeur général de la société Financière VM distribution.

 

Le 18 janvier 2018, la société a révoqué M. [O] de son mandat social de directeur général de la société Financière VM distribution.

 

Convoqué le 19 janvier 2018 à un entretien préalable, le salarié a été licencié le 12 février 2018 pour insuffisance professionnelle, l'employeur l'ayant dispensé d'exécuter son préavis et délié de son obligation de non-concurrence.

 

Il a saisi la juridiction prud'homale pour contester son licenciement et obtenir le versement des indemnités subséquentes.

 

Le salarié fait grief à l'arrêt de la cour d’appel (Poitiers, 6 mai 2021) de le débouter de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, pour perte de chance de ne pas souscrire de stock-options et pour perte des droits et cotisations à retraite.

 

Réponse de la Cour de cassation :

 

La Cour de cassation vise les articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail :

 

Il résulte de ces textes que le licenciement pour une cause inhérente au salarié doit être fondé sur des éléments constituant un manquement aux obligations qui résultent du contrat de travail.

 

Pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt de la cour d’appel retient que l'existence des carences managériales est établie au printemps 2017 par le tableau-synthèse du séminaire des cadres de direction du 28 avril 2017 et par l'état des lieux dressé par les auditeurs le 5 juillet 2017 et, enfin, par la proposition d'intervention intitulée "accompagnement de la branche négoce" présentée par le cabinet d'audit.

 

La cour d’appel ajoute que l'invocation du contexte particulier de changements d'orientation et de politique du groupe est inopérant à remettre en cause les conclusions du tableau-synthèse et de l'état des lieux du cabinet d'audit qui ont mis en évidence que sa politique managériale avait provoqué une grave crise de confiance en lui de la part de ses collaborateurs.

 

La cour d’appel relève enfin que ces carences ont persisté après la mission d'accompagnement dont le salarié a bénéficié durant le dernier trimestre 2017 et en conclut que l'insuffisance professionnelle est acquise.

 

Selon la Cour de cassation en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les faits reprochés au salarié se rapportaient à la période d'exercice par ce dernier de son mandat de directeur général au cours de laquelle son contrat de travail était suspendu, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés.

 

 Cass. soc., 17 mai 2023, n° 21-19.602, n° 537 F D

 

AL AVOCATS / ASSOUS-LEGRAND 

 

 

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