La prescription trentenaire se rapportant à la réunion de deux lots de copropriété par une partie commune ne profite pas forcément aux acquéreurs de ces deux lots.
Des copropriétaires ont réunis leurs lots par l’adjonction d’une partie commune.
Puis, ces copropriétaires ont vendus leurs lots sans intégrer, aux termes de l’acte de vente, la partie commune litigieuse.
Bien que le délai de prescription de 30 ans requis pour acquérir la propriété dudit couloir était déjà largement écoulé au moment de la vente, la Cour de cassation aux termes d’un arrêt du 15 février 2023 fait valoir que la cour d’appel n'a pu qu'en déduire que les acquéreurs ne justifiaient pas, à titre personnel, d'une possession trentenaire utile pour prescrire.
Les faits sont les suivants :
Par acte du 8 septembre 2010, M. et Mme [F] ont acquis, dans un immeuble soumis au statut de la copropriété, les lots n° 26, 27 et 28 ; la consistance mentionnée dans l'acte n’étant pas conforme à la configuration réelle des lieux, en raison de la transformation des lots en un appartement unique par le précédent propriétaire.
Certains copropriétaires, la société civile immobilière Alsaco, M. [W] et M. et Mme [K], copropriétaires, ont assigné les nouveaux acquéreurs en libération forcée des diverses parties communes occupées, selon eux, abusivement et en indemnisation.
Les acquéreurs M. et Mme [F] ont reconventionnellement demandé l'indemnisation des préjudices occasionnés par l'impossibilité de rénover leur bien.
M. et Mme [F] font grief à l'arrêt de la cour d’appel de Toulouse (1re chambre civile, section 1) de les condamner, sous astreinte, à libérer le couloir du quatrième étage, alors que les acquéreurs font valoir notamment concernant la prescription acquisitive :
-que pour compléter la prescription, on peut joindre à sa possession celle de son auteur;
-que dans leurs conclusions d'appel, les époux [F] faisaient valoir, preuve à l'appui, que l'usage privatif du couloir de desserte litigieux par le précédent propriétaire des lots n° 26, 27 et 28 datait des années 1970, de sorte qu'à la date de leur acquisition desdits lots, le 8 septembre 2010, le délai de prescription de 30 ans requis pour acquérir la propriété dudit couloir était déjà largement écoulé;
-qu'en se bornant à affirmer que les époux [F] ne justifiaient pas d'une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire, sans rechercher si, à la date de l'acquisition des lots n° 26, 27 et 28 par les époux [F], la prescription trentenaire n'était pas déjà acquise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard les articles 2265 et 2272 du code civil.
Position de la Cour de cassation :
Ayant constaté que le couloir litigieux n'était pas compris dans la vente du 8 septembre 2010 au titre des parties privatives cédées, la cour d'appel, qui ne s'est pas fondée sur la renonciation de M. et Mme [F] à un droit de propriété que le précédent propriétaire leur aurait transmis après en avoir lui-même fait définitivement l'acquisition par prescription, n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée sur la jonction des possessions.
La cour d’appel n'a pu qu'en déduire que M. et Mme [F] ne justifiaient pas, à titre personnel, d'une possession trentenaire utile pour prescrire.
Selon la Cour de cassation le moyen évoqué par M. et Mme [F] n'est donc pas fondé.
Cass. 3e civ., 15 févr. 2023, n° 21-21.446, n° 137 F-D
AL AVOCATS / ASSOUS-LEGRAND