Le principe constitutionnel de laïcité ne fait pas obstacle à ce qu’une décision de préemption soit prise, pour réaliser un équipement collectif à vocation cultuelle.

 

 

Le principe constitutionnel de laïcité ne fait pas obstacle à ce qu’une décision de préemption soit prise, dans le respect du principe de neutralité à l’égard des cultes et du principe d’égalité, en vue de permettre la réalisation d’un équipement collectif à vocation cultuelle.

 

Une telle décision n’est pas, par elle-même, constitutive d’une aide à l’exercice d’un culte prohibée par les dispositions de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat.

 

En revanche, ces dispositions impliquent, sauf à ce que la collectivité se fonde sur des dispositions législatives dérogeant aux dispositions de la loi du 9 décembre 1905, que la mise en œuvre d’un tel projet soit effectuée dans des conditions qui excluent toute libéralité et, par suite, toute aide directe ou indirecte à un culte.

 

Tels sont les principes relevés par le Conseil d’Etat aux termes d’un arrêt n° 447100 du 2 décembre 2022.

 

Les faits et moyens sont les suivants :

 

Mmes B... A..., Rolande A..., Colette A... et Pierrette A... ont demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 25 janvier 2017 par laquelle le maire de Montreuil a exercé le droit de préemption urbain renforcé sur une parcelle leur appartenant, située 223, rue de Rosny.

 

Par un jugement n° 1702610 du 1er février 2018, le tribunal administratif de Montreuil a annulé cette décision et précisé les obligations en découlant pour la commune en application de l'article L. 213-11-1 du code de l'urbanisme.

 

Par un arrêt n° 18VE01088 du 1er octobre 2020, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la commune de Montreuil contre ce jugement.

 

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 1er décembre 2020, 1er mars et 24 novembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Montreuil demande au Conseil d'Etat notamment d'annuler cet arrêt.

 

Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la décision du 25 janvier 2017 par laquelle le maire de Montreuil a exercé le droit de préemption urbain sur la parcelle appartenant aux consorts A... est destinée à permettre l'extension du centre socio-cultuel implanté sur le terrain communal mitoyen de la parcelle préemptée, qui a fait l'objet d'un bail emphytéotique administratif passé entre la ville de Montreuil et la fédération cultuelle des associations musulmanes de Montreuil afin, d'une part, d'augmenter la capacité d'accueil de la mosquée existante pour répondre aux besoins de la communauté musulmane locale ainsi que celle du parc de stationnement assurant l'accueil des fidèles et, d'autre part, de créer des salles de classe, des salles de conférences et une bibliothèque consacrées à l'enseignement religieux.

 

Eu égard à son objet et à son ampleur, ce projet présente le caractère d'une action ou d'une opération d'aménagement au sens des dispositions combinées des articles L. 210-1 et L. 300-1 du code de l'urbanisme.

 

Par suite, la commune de Montreuil est fondée à soutenir que la cour administrative d'appel de Versailles a inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en estimant que le projet était d'une ampleur insuffisante pour pouvoir être regardé comme un équipement collectif au sens de ces dispositions

 

Le Conseil d’Etat relève que la commune de Montreuil est fondée à soutenir, qu'en jugeant que la décision de préemption en litige était par elle-même constitutive d'une dépense illégale en faveur de l'exercice d'un culte contraire à la loi du 9 décembre 1905, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit.

 

Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Montreuil est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.

 

 

 CE, 22 déc. 2022, n° 447100

 

AL AVOCATS / ASSOUS-LEGRAND 

 

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