La garantie décennale en cas de travaux de reprise sur existant
Il appartient à l’entreprise chargée de reprendre des travaux sur existant suite à des désordres qui trouvaient leur cause originelle dans les épisodes de sécheresse, et en raison de leur aggravation, constatée par l'expert en 2012, de prendre en charge l’ensemble des contraintes techniques.
Selon la Cour de cassation, aux termes d’un arrêt du 14 sept. 2023, ces désordres étaient également imputables à la conception et à la réalisation des travaux de reprise des travaux de fondation par la société réparatrice, laquelle est intervenue sans prise en compte suffisante de la dalle flottante dont la faiblesse de celle-ci avait pourtant dès 2002 été identifiée.
Les faits sont les suivants :
Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 12 juillet 2021), la société Swisslife assurances de biens, assureur multirisques habitation de Mme [F] et de [D] [X], aux droits duquel viennent M. [L] [X] et Mmes [C], [P] et [A] [X], en leurs qualités d'héritiers de leur père décédé, a indemnisé ces derniers suite aux désordres résultant des fissurations affectant leur maison, dus à des mouvements de terrain consécutifs à plusieurs épisodes de sécheresse, ayant fait l'objet d'arrêtés de catastrophe naturelle.
En 2004, la société Soltechnic, assurée auprès de la SMABTP, a réalisé un confortement des fondations par micro-pieux.
En 2009, [D] [X] et Mme [F] ont constaté l'apparition de nouvelles fissures.
La société Swisslife a refusé de prendre en charge ce nouveau sinistre.
[D] [X] et Mme [F] ont, après expertise, assigné en réparation les sociétés Swisslife et Soltechnic. La SMABTP ainsi que la société Generali IARD, précédent assureur multirisques habitation, ont été appelées en la cause.
La société Soltechnic et la SMABTP font grief à l'arrêt de la cour d’appel de Toulouse du 12 juillet 2021, de dire que la responsabilité décennale de la société Soltechnic était engagée et de condamner cette société et son assureur in solidum à payer diverses sommes aux consorts [F] [X] à titre de réparation, alors que notamment :
- la garantie décennale d'un constructeur ne peut pas être mise en œuvre pour des désordres qui ne sont pas imputables à son intervention.
- les désordres observés proviennent de mouvements différentiels du complexe d'assise du dallage consécutifs aux phénomènes de retrait/gonflement des argiles constituant le sol d'assise, en période de sécheresse climatique et de réhydratation .
Réponse de la Cour de cassation :
La cour d'appel a relevé que la société Soltechnic, spécialisée et reconnue dans le domaine des travaux de sols et fondations spéciales, sollicitée par l'expert d'assurance, après une étude de sols réalisée en 2000 qui avait attribué les désordres à des mouvements de retraits argileux sous les semelles de l'ouvrage à la suite d'épisodes de sécheresse et identifié le phénomène de retrait-gonflement des argiles comme de grande ampleur, avait préconisé une solution profonde de reprise par micro-pieux et la réalisation de brochages en périphérie de la dalle flottante.
La cour d’appel a également constaté que, si la société Soltechnic avait réalisé, sous la maîtrise d'ouvrage des propriétaires de la maison, les renforcements de liaison en tête de micro-pieux, elle n'avait pas fait de réserve sur l'absence de consolidation du dallage, qu'elle avait pourtant préconisée, ni appelé l'attention des maîtres de l'ouvrage sur ce point.
La cour d’appel a pu en déduire, sans procéder par voie d'affirmation ni dénaturer par omission le rapport d'expertise que, si les désordres trouvaient leur cause originelle dans les épisodes de sécheresse, leur aggravation, constatée par l'expert en 2012, était également imputable à la conception et à la réalisation des travaux de reprise par la société Soltechnic sans prise en compte suffisante de la dalle flottante dont celle-ci avait pourtant dès 2002 identifié la faiblesse.
Par ces motifs, la Cour de cassation rejette la demande formée par la société Soltechnic et la SMABTP .
Cour de cassation, Chambre civile 3, 14 septembre 2023, 21-22.429, Inédit