Vices cachés : portée relative de la clause exonératoire

 

En matière de vices cachés il est habituel d’insérer, aux termes des actes notariés, une clause exonératoire des vices cachés au profit du vendeur.

 

La Cour de cassation se prononce dans le cadre de l’effectivité d’une clause exonératoire prévue aux termes d’un acte de vente notarié au profit du vendeur, laquelle clause exonératoire n’a pas été retenue…

 

Les faits sont les suivants :

 

Par acte du 11 octobre 2012, M. et Mme [K] ont vendu à M. et Mme [S] une maison d'habitation.

 

Constatant, après expertise, la présence d'amiante dans les plaques de fibrociment constituant la couverture de l'immeuble, les acquéreurs ont assigné leurs vendeurs en dommages-intérêts sur le fondement de la garantie des vices cachés.

 

Les vendeurs font grief à l'arrêt, rendu le 2 avril 2020 par la Cour d'appel de Chambéry (2e chambre), de faire droit aux demandes des acquéreurs et de constater :

 

- que les vendeurs avaient connaissance de la présence d'amiante au moment de la vente,

- que la clause exonératoire de responsabilité contenue dans l'acte de vente était inopposable aux acquéreurs,

- qu’il existait un vice caché affectant le bien immobilier.

 

En conséquence, M. et Mme [K] vendeurs, ont formé le pourvoi n° c 20-16.320 contre l'arrêt rendu le 2 avril 2020 par la Cour d'appel de Chambéry (2e chambre).

 

En effet, les vendeurs font valoir qu’en application de l’article 1641 du code civil « le vendeur est tenu de la garantie à raison des vices cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus ».

 

Selon ces derniers, la présence de l'amiante ne constitue pas, à elle seule, un vice caché dès lors qu'elle n'empêche pas l'usage de la chose et ne présente pas un danger.

 

Réponse de la Cour de cassation concernant ce moyen:

 

La Cour d'appel a souverainement retenu que, si le vice ne rendait pas la maison impropre à son usage, dans la mesure où l'amiante était confiné par l'isolation, il en diminuait l'usage de manière importante dès lors que des travaux affectant l'isolation intérieure des combles ou portant sur la toiture ne pourraient pas être entrepris sans qu'une procédure de travaux sur produits ou matériaux amiantés ne fût engagée elle en a déduit à bon droit que la maison était affectée d'un vice caché lors de la vente diminuant tellement son usage que, s'ils l'avaient connu, les acquéreurs n'en auraient donné qu'un moindre prix et qu'il convenait de fixer la réduction du prix telle qu'elle avait été arbitrée par l'expert.

 

La Cour de cassation fait donc valoir que le moyen évoqué par les vendeurs n'est pas fondé.

 

Concernant la clause exonératoire de responsabilité incluse aux termes de l’acte de vente :

 

En l'espèce, la clause litigieuse stipule que « l'acquéreur prendra le bien vendu dans l'état où il se trouve le jour de l'entrée en jouissance sans aucune garantie de la part du vendeur notamment pour raison de l'état des constructions, de leurs vices mêmes cachés, sous réserve des dispositions législatives ou règlementaires contraires ».

 

En application de l'article 1643 du code civil, le vendeur est tenu des vices cachés, quand bien même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il sera obligé à aucune garantie.

 

Néanmoins, en cas de mauvaise foi, le vendeur ne saurait se prévaloir d'une clause exonératoire.

 

Les vendeurs ont fait valoir à cet égard, notamment, qu'en l'espèce, pour caractériser la connaissance par les acquéreurs de l'existence de l'amiante et dire en conséquence qu'ils ne peuvent se prévaloir de la clause exonératoire de responsabilité, la cour d'appel a dit que « l'expert relève que l'entreprise de charpente n'a pas pu ne pas informer M. et Mme [K] de la nature de la couverture de la villa » ; qu'en statuant ainsi par un motif hypothétique, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

 

D’autre part, les vendeurs soutiennent n’être tenus qu'à une obligation de joindre à l'acte notarié un diagnostic amiante conforme à la règlementation en vigueur au moment de la vente et qu' « il appartenait éventuellement à l'acquéreur de s'inquiéter ou de solliciter toute précision sur les travaux de couverture effectués ».

 

Réponse de la Cour de cassation concernant ce deuxième moyen:

 

La Cour de cassation estime, sans plus de développement, « qu’il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation », en application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile.

 

En effet, aux termes de l’alinéa 2 de l’article 1014 cité « après le dépôt des mémoires, cette formation décide qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée lorsque le pourvoi est irrecevable ou lorsqu'il n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Toute formation peut aussi décider de ne pas répondre de façon spécialement motivée à un ou plusieurs moyens irrecevables ou qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ».

 

Cour de cassation, civile, chambre civile 3, 15 avril 2021, 20-16.320, inédit

 

 AL AVOCATS / ASSOUS-LEGRAND

 

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