Rupture du contrat de travail : montant plafonné des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

 

Lorsqu’un salarié est licencié de son emploi et que ce licenciement est prononcé comme abusif, il a droit à des dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

 

Cependant, le montant de ces indemnités est plafonné et déterminé par un barème issu de la réforme du Code de travail de 2017 qui a été effectuée par l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, plafonnement inscrit aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail.

 

En application de ce texte, la Cour de cassation par arrêt du 11 mai 2022, retient qu’en n'appliquant pas le barème prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail, alors que la salariée n'entrait dans aucune des exceptions prévues par ce texte qui permettaient de ne pas en faire application, la cour d'appel, qui a refusé d'appliquer la loi, a méconnu l'article L. 1235-3 du code du travail.

 

Observation : un deuxième arrêt a été rendu le même jour dans le même sens. (Cass. Soc., 11 mai 2022, n° 21-15.247).

 

A noter également que le Comité européen des droits sociaux (CEDS) a été saisi de réclamations à l’encontre du barème français. Toutefois la position du CEDS n’a pas force exécutoire.

 

Les faits sont les suivants :

 

Mme [E] a été engagée en qualité de coordinatrice, à compter du 2 septembre 2013, par la société Pleyel, centre de santé mutualiste.

 

Par lettre du 12 septembre 2017, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à un licenciement pour motif économique. Elle a adhéré au contrat de sécurisation professionnelle le 4 octobre 2017 puis, par lettre du 6 octobre 2017, son employeur lui a notifié la rupture de son contrat de travail pour motif économique à compter du 13 octobre 2017.

 

La salariée a contesté cette rupture.

 

Position de la Cour de cassation

 

En application de l'article L. 1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux fixés par ce texte.

 

A cet égard, il convient de relever qu'aux termes de l'article L. 1235-3-1 du code du travail, l'article L. 1235-3 de ce code n'est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d'une des nullités prévues au deuxième alinéa de l'article L. 1235-3-1 du code du travail.

 

Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l'exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

 

Les nullités mentionnées aux termes de l'article L. 1235-3-1 sont celles qui sont afférentes à :

 

1° La violation d'une liberté fondamentale ;

2° Des faits de harcèlement moral ou sexuel dans les conditions mentionnées aux articles L. 1152-3 et L. 1153-4 ;

3° Un licenciement discriminatoire dans les conditions mentionnées aux articles L. 1132-4 et L. 1134-4 ;

4° Un licenciement consécutif à une action en justice en matière d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans les conditions mentionnées à l'article L. 1144-3, ou à une dénonciation de crimes et délits ;

5° Un licenciement d'un salarié protégé mentionné aux articles L. 2411-1 et L. 2412-1 en raison de l'exercice de son mandat ;

6° Un licenciement d'un salarié en méconnaissance des protections mentionnées aux articles L. 1225-71 et L. 1226-13.

 

En conséquence, la Cour de cassation infirme l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris qui condamne l'employeur au paiement d'une somme supérieure au montant maximal prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail.

 

La cour d’appel a retenu que le montant plafonné représente à peine la moitié du préjudice subi en termes de diminution des ressources financières de la salariée et ne permet donc pas, compte tenu de la situation concrète et particulière de la salariée, âgée de 53 ans à la date de la rupture, une indemnisation adéquate et appropriée du préjudice subi, compatible avec les exigences de l'article 10 de la Convention n° 158 de l'OIT.

 

Selon la Cour de cassation, il appartenait seulement à la cour d’appel de Paris d'apprécier la situation concrète de la salariée pour déterminer le montant de l'indemnité due entre les montants minimaux et maximaux déterminés par l'article L. 1235-3 du code du travail.

 

La Cour de cassation valide ainsi le barème d'indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse, estimant qu’il est bien conforme à la Convention n° 158 de l'OIT. Elle écarte également toute possibilité pour les juges du fond de procéder à un contrôle in concreto lors de la mise en œuvre du barème.

 

Cass. soc., 11 mai 2022, n° 21-14.490

 

AL AVOCATS / ASSOUS-LEGRAND

 

 

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