Faute inexcusable de l'employeur : point de départ de la prescription
La Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Flandres a reconnu l'affection d’un salarié M. [X] [V] au titre de la législation professionnelle le 9 juin 2010.
M. [X] [V] a saisi le 26 juin 2013 la Caisse Primaire d'Assurance Maladie afin de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur et le tribunal des affaires de sécurité sociale le 18 décembre 2014.
Selon son employeur le délai de prescription de deux ans de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ne peut courir à compter de la cessation du travail que lorsque celle-ci est intervenue en raison de la maladie professionnelle constatée.
Telle n’est pas la position de la Cour de cassation qui retient aux termes de son arrêt en date du 16 mars 2023 que la cessation d'activité du salarié le 1er juillet 2012 est en lien avec sa pathologie puisqu'il a bénéficié du dispositif de cessation d'activité anticipée pour les travailleurs de l'amiante à compter de cette date .
Les faits sont les suivants:
La victime M. [X], salariée de la société (l'employeur), a déclaré une affection prise en charge, au titre du tableau n° 30 des maladies professionnelles, par la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres.
La victime a saisi d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
Ayant indemnisé la victime, le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (le FIVA) est intervenu à l'instance, pour la première fois en cause d'appel.
L'employeur fait grief à l'arrêt de la cour d’appel (Amiens, 9 février 2021), de dire l'action en reconnaissance de faute inexcusable formée à son encontre recevable pour ne pas être prescrite, alors que le délai de prescription de deux ans de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ne peut courir à compter de la cessation du travail que lorsque celle-ci est intervenue en raison de la maladie professionnelle constatée.
Selon l’employeur, en se contentant de relever un lien entre la cessation de la relation de travail et la maladie professionnelle, quand ce n'était que si la cessation de la relation de travail était intervenue en raison de la maladie professionnelle qu'elle pouvait constituer le point de départ de la prescription biennale, la cour d'appel a violé les articles L. 431-2, L. 461-1 et L. 461-5 du code de la sécurité sociale .
D’autre part, en statuant sans rechercher, comme la cour d’appel y était invitée, si postérieurement au premier certificat médical du 1er février 2010, qui avait constaté la présence de plaques pleurales chez le salarié et jusqu'à la rupture du contrat de travail intervenue le 1er juillet 2012, aucun arrêt de travail avait été prescrit au salarié en raison de sa maladie, le salarié ayant d'ailleurs encore été déclaré apte à son poste par le médecin du travail le 22 mai 2012, ce qui démontrait que la cessation de la relation de travail n'avait pas été entrainée par la maladie et qu'elle ne pouvait donc servir de point de départ à la prescription biennale de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 431-2 et L. 461-1 et L. 461-5 du code de la sécurité sociale. »
Réponse de la Cour de cassation concernant le moyen se fondant sur la prescription
La Cour de cassation vise les articles L. 431-2 et L. 461-1 du code de la sécurité sociale, (le second dans sa rédaction issue de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, applicable au litige), aux termes desquels les droits de la victime ou de ses ayants droit au bénéfice des prestations et indemnités prévues par la législation professionnelle se prescrivent par deux ans à compter soit:
- de la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle,
- de la cessation du travail en raison de la maladie constatée,
- du jour de la clôture de l'enquête,
- de la cessation du paiement des indemnités journalières,
- encore de la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie.
Ayant retenu que le salarié a été informé du lien possible entre sa maladie et son activité professionnelle par un certificat médical du 1er février 2010.
Le caractère professionnel de sa maladie a été reconnu le 17 juin 2010 .
La cessation d'activité le 1er juillet 2012 est en lien avec cette pathologie puisqu'il a bénéficié du dispositif de cessation d'activité anticipée pour les travailleurs de l'amiante à compter de cette date .
La Cour de cassation confirme l’arrêt rendu par la cour d'appel, qui a exactement déduit que la demande de reconnaissance de maladie professionnelle formée le 26 juin 2013, dans le délai de deux ans de la cessation du travail en raison de la maladie constatée, n'était pas prescrite.
Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 16 mars 2023, 21-14.922, Inédit
AL AVOCATS / ASSOUS-LEGRAND