Assurance dommage ouvrage : les conditions de mise en œuvre
La Cour de cassation s’est récemment prononcée aux termes d’un arrêt 1er avril 2021, sur les modalités d’application de l’article L 242-1 du code des assurances en vertu duquel « Toute personne physique ou morale qui, agissant en qualité de propriétaire de l'ouvrage, de vendeur ou de mandataire du propriétaire de l'ouvrage, fait réaliser des travaux de construction, doit souscrire avant l'ouverture du chantier, pour son compte ou pour celui des propriétaires successifs, une assurance garantissant, en dehors de toute recherche des responsabilités, le paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1, les fabricants et importateurs ou le contrôleur technique sur le fondement de l'article 1792 du code civil ».
En effet, l'assurance dommage ouvrage prend effet après l'expiration du délai de garantie de parfait achèvement visé à l'article 1792-6 du code civil.
Toutefois, elle garantit le paiement des réparations nécessaires lorsque :
Avant la réception, après mise en demeure restée infructueuse, le contrat de louage d'ouvrage conclu avec l'entrepreneur est résilié pour inexécution, par celui-ci.
Après la réception, et après mise en demeure restée infructueuse, l'entrepreneur n'a pas exécuté ses obligations. Lire la suite….
Les faits sont les suivants :
L'Institut national de l'environnement industriel et des risques (l'Ineris) a entrepris la construction d'un bâtiment à structure en bois.
L'Ineris a confié une mission d'assistance au maître de l'ouvrage à la société Icade G3A, devenue Icade promotion, la maîtrise d'œuvre à un groupement solidaire composé de la société Quatreplus architecture, mandataire, assurée auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF), et de la société Sodeg ingénierie, devenue Artelia bâtiment et industrie, le lot menuiseries extérieures à la société Alexandre, désormais en liquidation judiciaire, assurée auprès de la SMABTP, et une mission de contrôle technique à la société Bureau Veritas, aux droits de laquelle vient la société Bureau Véritas construction.
Une assurance dommages-ouvrage a été souscrite auprès de la société Axa France IARD.
L'Ineris a pris possession des lieux en juillet 2006.
Se plaignant d'infiltrations en provenance des menuiseries extérieures, apparues au mois de décembre 2006, l'Ineris a déclaré le sinistre à l'assureur dommages-ouvrage qui a refusé sa garantie au motif de l'absence de réception.
L'Ineris a, après expertise, assigné en indemnisation les intervenants à l'acte de construire et leurs assureurs, ainsi que l'assureur dommages-ouvrage.
Or il est fait grief à l'arrêt de la cour d’appel attaqué (Paris, 13 mars 2019), d'avoir débouté l'Ineris de ses demandes formées à l'encontre de la société chargée de la mission assistance maitre d’ouvrage pour avoir refusé de prononcer la réception de l'ouvrage au motif que les désordres "ne pouvaient pas entrer dans le champ d’application de la garantie de la société Axa France IARD en sa qualité d’assureur dommage ouvrage .
En effet, l'Ineris soutient que, si la réception avait été prononcée, elle aurait pu bénéficier de l'assurance dommages ouvrages, puisque la société Alexandre, chargée des menuiseries, avait été mise en demeure de remédier aux non-conformités et aux malfaçons qui lui étaient imputables à plusieurs reprises, sans succès.
La position de la Cour de cassation :
La Cour de cassation se fonde sur l’article L 242-1 alinéa 8 du code des assurances et censure l’arrêt de la cour d’appel en application de l'article L. 242-1, alinéa 8, du code des assurances, lui reprochant de n’avoir pas recherché, comme elle y était invitée, si la garantie dommage ouvrage aurait pu être utilement mobilisée si la réception avait été prononcée avec réserves.
Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 1 avril 2021, 19-16.179, publié au bulletin
AL AVOCATS / ASSOUS-LEGRAND
.