Le professionnel de la construction est tenu, avant réception, d'une obligation de résultat
Sans inverser la charge de la preuve , la Cour de cassation confirme aux termes d’un arrêt rendu le 16 mars 2022, que le professionnel de la construction est tenu à l'égard du maître de l'ouvrage d'une obligation de résultat jusqu'à la réception, et devait en conséquence supporter le coût de reprise des désordres constatés affectant le lot qui lui avait été confié.
Les faits sont les suivants :
[B] [M], aux droits duquel viennent leurs héritiers ont confié à M.[K], assuré auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF), une mission de maîtrise d'œuvre complète en vue de la réhabilitation et de la remise aux normes d'un immeuble.
Se plaignant de malfaçons et de l'absence d'achèvement des travaux, en particulier concernant les peintures, les maîtres de l'ouvrage ont, après expertise, assigné en réparation notamment la société Trentini, titulaire du lot peinture.
La cour d'appel, (Bordeaux, 22 octobre 2020), a relevé que les désordres affectant les ouvrages étaient apparus avant réception.
Concernant la peinture, la société Trentini fait grief à l'arrêt de la cour d’appel, de la condamner à payer une certaine somme aux maîtres de l'ouvrage au titre des travaux de réfection des peintures.
Or la société TRENTINI fait valoir à cet égard:
- que pour retenir la responsabilité de la société Trentini au titre du lot peinture, la cour d'appel a retenu que l'expert judiciaire avait relevé des salissures sur l'ensemble des murs intérieurs du bâtiment et que cette société ne démontrait pas autrement que par ses affirmations que les désordres rendant nécessaires les travaux de reprise ne ressortaient pas de sa responsabilité étant rappelé qu'elle était tenue à une obligation de résultat;
- qu'en statuant ainsi, quand il appartenait au maître de l'ouvrage de rapporter la preuve que ces salissures, étaient imputables à l'intervention de la société Trentini laquelle affirme qu'elles avaient été causées par d'autres entreprises après qu'elle eut achevé les travaux que lui avait commandés l'architecte, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 devenu 1353 du code civil .
- qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu, par motifs propres, que le maitre d’œuvre était chargé d'une mission complète d'architecte incluant la direction de l'exécution et la comptabilité des travaux, qu'il a manqué à ses obligations contractuelles notamment de suivi de chantier, de contrôle de l'exécution des travaux et de l'avancement.
De plus, l’attitude du maitre d’œuvre, en phase d'exécution a conduit à un véritable blocage de la situation, constaté par l'expert judiciaire, du fait de la défaillance de certaines entreprises et de l'impuissance de l'architecte à redresser la situation .
- qu'en retenant néanmoins la responsabilité de la société Trentini et en mettant à sa charge la totalité des coûts de reprise du lot peinture, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'absence de finition de ce lot n'était pas uniquement imputable aux fautes commises par l'architecte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.
La position de la Cour de cassation
En premier lieu, la cour d'appel a constaté que la société Trentini était chargée du lot peinture et que celui-ci n'avait pas fait l'objet d'une réception.
La cour d’appel a pu en déduire, sans inverser la charge de la preuve ni être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que l'entreprise, tenue à l'égard du maître de l'ouvrage d'une obligation de résultat jusqu'à la réception, devait supporter le coût de reprise des salissures affectant le lot qui lui avait été confié.
La cour d’appel a donc a ainsi légalement justifié sa décision en condamnant la société TRENTINI titre des travaux de réfection des peintures.
Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 16 mars 2022, 21-10.110, Inédit
AL AVOCATS/ ASSOUS-LEGRAND