Urbanisme – droit de préemption urbain :règles non prises en compte lors de la délivrance du permis de construire

 

Il résulte des dispositions des articles R. 423-1 et R. 431-5 du code de l’urbanisme que les demandes de permis de construire doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1.

 

Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la règlementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur.

 

Ce qui signifie que l’attestation suffit en principe, , même sur un terrain communal, sauf suspicion de fraude.

 

Tel est le principe rappelé par le Conseil d’Etat aux termes d’un arrêt du 28 octobre 2025.

 

 

Les faits sont les suivants :

 

M. F... et autre et, d'autre part, le syndicat des copropriétaires du 111 rue de la République à Puteaux et autres, ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés des 20 juillet 2022 et 3 juillet 2023 par lesquels la maire de Puteaux a délivré à la société par actions simplifiée (SAS) République un permis de construire et un permis de construire modificatif en vue de la réalisation de deux immeubles de quarante-deux logements collectifs, six maisons individuelles et deux niveaux de parking en sous-sol.

 

Par deux jugements du 16 juillet 2024 le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé ces arrêtés.

D 'une part, la société République et, d'autre part, la commune de Puteaux, se pourvoient en cassation, contre ces 2 jugements.

 

Aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager, ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux (...) ". Aux termes de l'article R. 431-5 du même code la demande de permis de construire comporte " l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis ".

 

Il résulte de ces dispositions que les demandes de permis de construire doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 énoncé ci-dessus.

 

 

Ainsi, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à l'article R. 423-5 du code doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande.

Il résulte de ce qui précède que les tiers ne sauraient utilement invoquer, pour contester une décision accordant une telle autorisation au vu de l'attestation requise, la circonstance que l'administration n'en aurait pas vérifié l'exactitude.

 

Toutefois, lorsque l'autorité saisie d'une telle demande de permis de construire vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d'instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaitre, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de refuser la demande de permis pour ce motif.

 

La circonstance que le terrain d'assiette du projet de construction appartienne au domaine privé d'une personne publique est sans incidence sur les pièces à produire par le pétitionnaire pour attester de sa qualité pour présenter la demande de permis comme sur les conditions, décrites aux points ci-dessus évoqués  dans lesquelles l'autorité compétente pour délivrer le permis peut lui dénier cette qualité.

 

Au cas présent, le tribunal administratif a déduit du seul fait de l'absence de délibération du conseil municipal de Puteaux autorisant la société République à déposer une demande de permis de construire sur un terrain appartenant au domaine privé de la commune que la maire disposait nécessairement d'informations faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne disposait d'aucun droit à déposer la demande de permis de construire litigieuse.

 

En se fondant sur cette circonstance pour juger que la décision attaquée avait été prise en méconnaissance des dispositions de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, alors que la société pétitionnaire avait attesté de sa qualité pour présenter la demande de permis et que la circonstance retenue n'était pas de nature à établir que cette société ne pouvait faire valoir aucun droit pour déposer la demande, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a commis une erreur de droit.

 

Il résulte de ce qui précède que la société République et la commune de Puteaux sont fondées, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de leurs pourvois, à demander l'annulation des jugements du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 16 juillet 2024 ayant annulé les arrêtés du 20 juillet 2022 et 3 juillet 2023.

 

Le Conseil d’Etat confirme ainsi que le service instructeur (la mairie) n’a pas en principe l’obligation de vérifier la validité de l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1. La fourniture d’une attestation suffit généralement — l’administration n’a pas à vérifier d’office la « qualité » du pétitionnaire, sauf s’il existe des éléments manifestes de fraude ou d’illégalité

 

Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 28/10/2025, 497933

 

 

 

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