COPROPRIETE - Charges - Procédure de recouvrement accéléré

 

L’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit une procédure de recouvrement accéléré(statut de la copropriété)  mise en œuvre pour obtenir le paiement des charges impayées.

La Cour de cassation rappelle les conditions de mise en œuvre de cette procédure accélérée aux termes d’un arrêt du 20 novembre 2025.

 

En effet, la procédure de recouvrement accéléré ne peut être utilisée que pour des sommes dont l’exigibilité est certaine et clairement établie

 

Si le syndicat des copropriétaires est recevable à agir sur le fondement de l'article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965 en paiement d'une provision due au titre de l'article 14-1 ou du I de l'article 14-2, des provisions non encore échues devenues exigibles, ainsi que des arriérés de charges des exercices précédents approuvés par l'assemblée générale, il ne l'est pas pour agir en paiement des sommes restant dues au titre d'exercices précédents, pour lesquels les comptes du syndicat n'ont pas encore été approuvés.

Faits et procédure

 

M. et Mme [O] (les copropriétaires) sont propriétaires de lots dans la résidence Le , soumise au statut de la copropriété, dont le règlement de copropriété a été modifié le 20 décembre 2005 pour prévoir expressément une destination de résidence-services.

 

Le 28 décembre 2021, le syndicat des copropriétaires de la résidence les a assignés en paiement de provisions pour charges de services pour les exercices 2018 à 2021 sur le fondement de l'article 19-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, devant le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond.

 

La cour d’appel d’Orléans avait autorisé le recours à cette procédure, condamnant des copropriétaires à payer.

 

Le pourvoi (n° 23-23.315) a été formé contre cette décision, et aboutit devant la Cour de cassation le 20 novembre 2025.

 

Les copropriétaires font grief à l'arrêt de la cour d’appel de déclarer recevable l'action du syndicat des copropriétaires et de les condamner à lui payer une certaine somme au titre de charges, alors « que le budget prévisionnel étant voté chaque année et les provisions versées par les copropriétaires ne concernant que l'année en cours et non les exercices précédents, la procédure de recouvrement accélérée n'est applicable qu'aux provisions dues pour l'année en cours et aux sommes restant dues appelées au titre des exercices précédents après approbation des comptes ; qu'en faisant droit à la demande du syndicat des copropriétaires quand elle constatait, par motifs adoptés, qu'elle concernait les années 2018 à 2021, ce qui excluait que la procédure de recouvrement puisse être mise en œuvre pour les années antérieures à l'exercice 2021, sauf approbation des comptes dont elle n'a pas constaté l'existence, la cour d'appel a violé les articles 14-1 et 19-2 de la loi du 10 juillet 1965 dans leur rédaction issue de la loi Elan du 23 novembre 2018. »

 

Réponse de la Cour de cassation

 

La Cour de cassation vise les articles 14-1, 14-2, I et 19-2, alinéas 1er à 3, de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, les premiers dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021, le dernier dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2019-738 du 17 juillet 2019, et l'article 45-1 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 .

 

Selon le premier de ces textes, pour faire face aux dépenses courantes de maintenance, de fonctionnement et d'administration des parties communes et équipements communs de l'immeuble, le syndicat des copropriétaires vote, chaque année, un budget prévisionnel. Les copropriétaires versent au syndicat des provisions égales au quart du budget voté. Toutefois, l'assemblée générale peut fixer des modalités différentes.

 

Aux termes du deuxième, ne sont pas comprises dans le budget prévisionnel les dépenses pour travaux dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat. Les sommes afférentes à ces dépenses sont exigibles selon les modalités votées par l'assemblée générale.

 

Aux termes du troisième, à défaut du versement à sa date d'exigibilité d'une provision due au titre de l'article 14-1 ou du I de l'article 14-2, et après mise en demeure restée infructueuse passé un délai de trente jours, les autres provisions non encore échues en application des mêmes articles 14-1 ou 14-2 ainsi que les sommes restant dues appelées au titre des exercices précédents après approbation des comptes deviennent immédiatement exigibles. Le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond, après avoir constaté, selon le cas, l'approbation par l'assemblée générale des copropriétaires du budget prévisionnel, des travaux ou des comptes annuels, ainsi que la défaillance du copropriétaire, condamne ce dernier au paiement des provisions ou sommes exigibles. Le présent article est applicable aux cotisations du fonds de travaux mentionné à l'article 14-2.

 

Selon le dernier, au sens et pour l'application des règles comptables du syndicat, sont nommées provisions sur charges les sommes versées ou à verser en attente du solde définitif qui résultera de l'approbation des comptes du syndicat. Les charges sont les dépenses incombant définitivement aux copropriétaires, chacun pour sa quote-part.

 

Il en résulte que si le syndicat des copropriétaires est recevable à agir sur le fondement de l'article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965 en paiement d'une provision due au titre de l'article 14-1 ou du I de l'article 14-2, des provisions non encore échues devenues exigibles, ainsi que des arriérés de charges des exercices précédents approuvés par l'assemblée générale, il ne l'est pas pour agir en paiement des sommes restant dues au titre d'exercices précédents, pour lesquels les comptes du syndicat n'ont pas encore été approuvés.

 

Pour déclarer recevable l'action du syndicat des copropriétaires et condamner les copropriétaires à lui payer une certaine somme au titre des charges impayées au 30 juin 2021, l'arrêt de la cour d’appel, retient, par motifs adoptés, qu'il est sollicité paiement de diverses redevances de services facturées de l'année 2018 à l'année 2021 et qu'il ressort des procès-verbaux des assemblées générales du 26 juin 2019, du 22 janvier 2021 et du 29 juin 2021 que les budgets prévisionnels des services pour les années 2018, 2019, 2020 et 2021 ont été adoptés.

 

En se déterminant ainsi, sans rechercher comme il le lui était demandé, si les comptes du syndicat des copropriétaires pour les exercices 2018 à 2020 avaient été approuvés, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

 

La Cour de cassation casse l’arrêt de la cour d’appel notamment en ce qu’elle avait accepté le recours à la procédure de recouvrement accéléré.

 

la Cour de cassation relève que la cour d’appel ne s’est pas assurée que les comptes des exercices antérieurs (ici 2018–2020) avaient été approuvés — condition indispensable pour que les arriérés correspondants puissent être exigés via l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965.

 

Civ. 3e, 20 nov. 2025, n° 23-23.315, FS-B

 

 

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